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par Ahmed Remili, lundi 27 février 2017, 00:21
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DIABETE ET GROSSESSE

Diabète
pré-gestationnel et grossesse

Introduction :

La grossesse qui survient sur un
diabète pré-existant est une grossesse à haut risque materno-fœtal, en raison
de :

Complications métaboliques

L’aggravation des complications dégénératives
(rétinopathie, néphropathie)

Augmentation des risques périnataux (embryo-fœtopathies,
prématurité, macrosomie, dystocie des épaules et mort périnatale).

Ces risques sont liés au déséquilibre
glycémique maternel (hyperglycémie) depuis la période pré-conceptionnelle et
pendant la grossesse.

L’obtention d’un bon équilibre
glycémique depuis la période pré-conceptionnelle et jusqu’à l’accouchement est
primordial et nécessite une prise en charge multidisciplinaire.

Physiopathologie :

Le diabète de type
1 (DT1, anciennement diabète insulinodépendant) est la conséquence de la
destruction auto-immune des cellules insulino-sécrétrices dites cellules β des
îlots de Langerhans.

Entrainant une
carence absolue de l’insulino-sécrétion et une insulinodépendance.

D’autres parts le
DT2 (anciennement DNID) dont la patiente est sous les ADO qui sont
contre-indiqués pendant la grossesse.

Lors du premier
trimestre, on note une tendance à l’hypoglycémie de jeûne, alors qu’au deuxième
trimestre s’installe progressivement une altération de la sensibilité à
l’insuline, rendant nécessaire l’augmentation des doses d’insuline.

Au cours du
troisième trimestre  l’instabilité
glycémique est plus grande avec un risque accru d’acidocétose, notamment lors
de l’accouchement.

Ensuite les
besoins en insuline chutent brutalement de 30 % après la délivrance, exposant
alors au risque d’hypoglycémie maternelle.

Dans le diabète
de type 2, il existerait une exagération de l’insulino-résistance normalement
présente lors de la grossesse normale et/ou une anomalie de
l’insulino-sécrétion.

Tout ceci
entretient un état d’hyperglycémie chronique qui entraînerait un transfert
accru de glucose chez le fœtus et, en réaction, un hyperinsulinisme fœtal. Il a
été constaté un transfert accru de lipides (triglycérides
et acides gras libres) et une augmentation de la surface graisseuse chez le
fœtus.

 

Risques du
diabète prégestationnel
:

Complications
maternelles

- Instabilité
métabolique
avec risque
hypoglycémique au 1e T puis hyperglycémie et acidocétose au 3eT.

- Complications
dégénératives
 
(Micro-angiopathie) : la grossesse majore théoriquement le risque de
survenue, voire d’apparition d’une rétinopathie diabétique.

Concernant la néphropathie, on constate une
augmentation de la protéinurie au fur et à mesure de l’avancée de la grossesse,
La néphropathie expose malgré tout au risque d’hypertension artérielle pendant
la grossesse.

- Le
risque de prééclampsie est significativement accru en cas de patiente
diabétique parallèlement à la sévérité du diabète.

- Risque
accru d’infection urinaire avec pyélonéphrite si l’infection n’est pas dépistée
et traitée.

 

Complications
fœtales
 :

Au 1eT : (organogénèse) du à l’effettératogène
des désordres métaboliques dominés par l’hyperglycémie maternelle surtout les 8eSA et concerne l’appareil cardiovasculaire, le système nerveux central, le
squelette et l’appareil urogénital.

 

Principales
malformations fœtales rencontrées lors d’un diabète maternel

de type 1. D’après Sheffield JS,
Butler-Koster EL, Casey BM, McIntire DD, Leveno KJ. 2002

 

organes

Fréquentes

Rares

Cœur

Transposition des gros vaisseaux

Communication inter-auriculaire

Communication interventriculaire

Coarctation de l’aorte

Cardiomyopathie

Tétralogie de Fallot

Hypoplasie du cœur gauche

Sténose pulmonaire

Retour veineux pulmonaire anormal

Système nerveux

central

Anencéphalie

Hydrocéphalie

Spina bifida

Holoprosencéphalie

Encéphalocèle

Dysplasie septo-optique

Reins et voies

urinaires

Hydronéphrose

Dysplasies rénales

Agénésie rénale

Duplicité urétérale

Hypospade

Micro-pénis

Ambiguïté sexuelle

Méga-uretère

Squelette

Agénésie sacrée

Anomalies vertébrales

Hypoplasie de membres

Syndrome de régression caudale

Polydactylie

Syndactylie

Clinodactylie

Intestin et estomac

Atrésie duodénale

Atrésie de l’œsophage

Imperforation anale

Malrotation

Volvulus

Omphalocèle

Laparoschisis

Hernie Diaphragmatique

Face

Fentes

Anomalies des oreilles

Cataracte

Colobome

Hypoplasie du nerf optique

Atrésie des choanes

Fusion orbitale

Autres

Artère ombilicale unique

Sténose trachéale

Anomalies des arcs branchiaux

 

Au 2eet 3e T : macrosomie, qui prédomine sur l’extrémité
supérieure du tronc avec une augmentation significative du périmètre
scapulaire, et surtout une différence (épaules-tête) en moyenne supérieure de 4
cm par rapport à des enfants macrosomes issus de mères non diabétiques avec
risque de dystocie des épaules majorant à la fois le risque maternel et fœtal.

 

L’hypotrophie fœtale  est 
fréquente chez les nouveau-nés de mère diabétique, surtout si la mère
présente des anomalies vasculaires ou une néphropathie.

La mort fœtale in utero survient
essentiellement au cours des diabètes déséquilibrés. La décompensation d’une
cardiomyopathie hypertrophique favorisée par des troubles du rythme cardiaque
brutaux et imprévisibles.

A l’accouchement :

La prématurité spontanée et
induite.

Les détresses respiratoires sont
plus fréquentes chez les nouveau-nés de mères diabétiques. Elles sont liées au
retard de maturation du surfactant pulmonaire, du fait de l’hyperinsulinisme
fœtal  et de la prématurité.

Les troubles métaboliques
néonataux : l’hypoglycémie néonatale,hypocalcémie,
une hyperbilirubinémie ou une polyglobulie secondaire à l’hypoxie.

Les
contre-indications à la grossesse chez les femmes diabétiques
 :

· Rétinopathie
Floride non traitée,

· Néphropathie
avancée avec insuffisance rénale,

· HTA
sévère,

· Coronaropathie

Prise en charge
de la grossesse en cas de DT1
 :

1° Programmation
de la grossesse : diabétologue
et obstétricien

Le  diabétologue doit :

ü Evaluer  le risque médical de la grossesse,

ü Définir avec la patiente les modalités
du traitement insulinique et sa surveillance,

ü Analyser  les éléments morbides susceptibles de nuire
au bon déroulement de la grossesse,

ü Enfin être prêt à intervenir chaque
fois qu’un événement intercurrent rend plus aléatoire l’équilibre du diabète et
tout particulièrement au moment de l’accouchement.

ü Bilan comprend : dans le but de
rechercher de lésions de micro-angiopathie et macro-angiopathie

· Fond
d’oeil, voire angiographie

· Créatinine,
micro-albuminurie

· HbA1c
: grossesse possible si HbA1c < 7 %

· Recherche
de foyers infectieux

· Information
sur les modalités de prise en charge et le renforcement de la surveillance

· Éducation
de la patiente

L’obstétricien :

ü Sérodiagnostic toxoplasmose, rubéole,

ü Groupe Rhésus, recherche
d’agglutinines irrégulières

ü Information sur les modalités de
surveillance de la grossesse et les complications possibles en fonction des
antécédents (contrôle du diabète, d’une HTA)

ü Vérifie l’absence de thérapeutiques
nécessitant d’être interrompues en cas de grossesse (inhibiteur de l’enzyme de
conversion de l’angiotensine, ARAII)

 

2° Surveillance
de la grossesse : nécessite une collaboration multidisciplinaire
(diabétologue et obstétricien ± diététicienne ± ophtalmologue)

 

Diabétologue :

Poids, PA

Bandelette
urinaire,

ECBU/mois

Fructosamine/15
jours

HbA1c /mois

FO à chaque
trimestre ± fonction de la rétinopathie

 

Obstétricien :

L’examen  clinique maternel :

Surveillance
fœtale :

– échographie
11-14 SA : pour confirmer le terme et programmer la date d’accouchement

– échographie
20-22 SA : pour l’étude de la morphologie, complétée si besoin par une
échocardiographie fœtale  et Surveillance
de la croissance.

 

Règles
hygiénodiététiques 
:
(diététicien)

Le régime
alimentaire : 1800 à 2 000 kcal/j, répartis en  04 à 06 prises quotidiennes dont une
souhaitable au coucher pour réduire les hypoglycémies nocturnes et matinale.

 

Insulinothérapie
optimisée 
:

Schéma  à 03 injections/j : 8h (rapide), 12h
(rapide), 20 h (rapide + NPH)

L’objectif :

La glycémie
capillaire est dosée quotidiennement avant et après les trois repas et vers 3
heures du matin 2 à 4 fois par mois.

Avant  les repas, au coucher et la nuit est entre
0,60 et 0,99 g/l.

L’objectif du pic
postprandial, se situe entre 1,00 et 1,29 g/l 
(moins de 1,20 g/l 2 heures après).

 

Surveillance
fœtale
 : en plus du dépistage
échographique, on a recours au dépistage des anomalies du rythme cardiaque
fœtal (ERCF) (A partir de 32 SA), attention au risque de faux négatif (décès
fœtal dans la semaine qui suit un tracé normal).

Le doppler
obstétrical ne trouve d’indication sauf en cas de RCIU ou de sd vasculorénal.

Une
hospitalisation est nécessaire en cas de mal équilibre glycémique, dans le but
d’intensifier la surveillance et d’éventuelle extraction en cas d’anomalie du
RCF.

 

Modalités de
l’accouchement :

L’accouchement
devrait se faire dans une maternité de niveau 3 avec un protocole anesthésique
et diabétologique préétabli (perfusion de glucosé + insulinothérapie à la PSE
dont le débit adapté grâce à la glycémie horaire.

NB : chute
des besoins insulinique de 30 à 50 % après délivrance.

Une anesthésie
péridurale doit être prévue si l’accht par VB est décidé.

 

Prise en charge
du nouveau-né de mère diabétique 
:

Risque
hypoglycémique (G < 0,40 g/l à terme et < 0,30 g/l en cas de prématuré) précoce
dans les 1e heures de vie et pdt 2 à 7 j. donc une surveillance
horaire de la glycémie est nécessaire pour la dépister.

Hypocalcémie si
< 1,80 mmol/l

Polyglobulie majeur
doit être traitée par saignée pour que l’Ht < 60%

Hyperbilirubinémie :
traitée par photothérapie

Le risque de
détresse respiratoire prévenu par un bon contrôle glycémique, éviter les
naissances prématurées si possible, la SFA et la césarienne réalisée en début
du travail.

La cardiopathie
hypertrophique : liée à la macrosomie et le déséquilibre glycémique, peut
se compliquer d’insuffisance cardiaque, elle le plus souvent asymptomatique.

Les signes
cliniques régressent en 15-30 j et les signes échographique en 3-4 mois.

 

Prise en charge
maternelle :

Les doses
d’insuline seront réduite et les objectifs glycémiques moins strictes d’autant
plus qu’il y a risque d’hypoglycémie dans le postpartum.

L’allaitement
doit être encouragé.

La contraception  par stérilet ou pilule soit microprogestative
soit minidosée après le retour de couche.

 

Le diabète
gestationnel
 :

Définition : (OMS) Le DG est un trouble de la
tolérance au glucose de sévérité variable, débutant ou diagnostiquée pour la
première fois pendant la grossesse, quelle qu'en soit l'évolution après
celle-ci.

Conséquences du
DG
 :

Maternelles :

- Immédiate
: augmentation de la fréquence de l'HTA gravidique

- Tardive :
10 à 60 % des femmes deviendront diabétiques dans les 20 ans.

Fœtales :

- La
macrosomie et un risque accru de dystocie des épaules.

- La
mortalité in utero est augmentée en l'absence de traitement si les glycémies à
jeun sont supérieures à 1,05 g/L.

- Le
risque de malformations congénitales n'est pas augmenté (sauf en cas de diabète
préalable méconnu).

- Le
principal risque néonatal est l'hypoglycémie, dont l'incidence est un
peu augmentée, selon les taux de glycémie maternelle et la macrosomie de
l'enfant (contrairement aux diabètes de type 1 ou de type 2 préexistants où les
complications néonatales sont fréquentes).

- A
long terme il y a risques de diabète de type 2 et d'obésité dans l’enfance.

 

DEPISTAGE ET DIAGNOSTIC :

Le dépistage 
repose sur des tests de glycémie.

Facteurs de risque de DG : l’existence d’au moins un seul facteur
justifie le dépistage :

- âge
maternel ≥ 35 ans,

- IMC
≥ 25 kg/m2,

- antécédents
de diabète chez les apparentés au 1e 
degré,

- antécédents
personnels de DG

- antécédents
personnels d’enfant macrosome.

- La
mise en évidence de biométries fœtales 
supérieures au 97e percentile ou d’un hydramnios chez une femme sans
facteurs de risque.

 

Modalités :

           Une glycémie à jeun lors de la
1e  consultation prénatale (1eT)

Dépistage du DG par une hyperglycémie
provoquée par voie orale (HGPO) est recommandé entre 24 et 28 SA, date à
laquelle la tolérance au glucose se détériore au cours de la grossesse.

 

Méthodes de dépistage :

Au 1e T : on réalise une
glycémie à jeun : Le diagnostic  DT2
sur une glycémie à jeun ≥1,26 g/l (7 mmol/l).

Entre 24 et 28 SA : il existe actuellement
deux méthodes diagnostiques :

-  la méthode en deux temps (dépistage par test
d’O’SULLIVAN = dosage de la glycémie une heure après ingestion de 50 g de
glucose, puis diagnostic par une HGPO avec 100 g de glucose)

- la
méthode en un temps (HGPO avec 75 g de glucose) avec mesure des glycémies à 0,
1 et 2 h

- le
diagnostic de DG la valeur de 0,92 g/l (5,1 mmol/l) de glycémie à jeun à partir
de de la 20e SA, définie par un consensus international,
l’International Association of Diabetes Pregnancy Study Group (IADPSG).

- Entre
24 et 28 SA le diagnostic du DG est retenu devant une glycémie à jeun ≥ 0,92
g/l (5,1 mmol/l) et/ou glycémie 1 heure après une charge orale de 75 g de
glucose ≥ 1,80 g/l (10,0 mmol/l) et/ou glycémie 2 heures après la charge ≥1,53
g/l (8,5 mmol/l).

 

Prise en charge
du DG

Le traitement
spécifique du DG (diététique, autosurveillance glycémique, insulinothérapie si
indiquée) réduit les complications périnatales.

L’objectif est
d’obtenir une glycémie à jeun <  0,95
g/l

L’apport
calorique est entre 25 et 35 kcal/kg/j, dont 40 % à 50 % d’hydrate de carbone.

Une activité
physique régulière, en l’absence de contre-indication obstétricale, environ 30
minutes trois à cinq fois par semaine.

L’insuline doit
être envisagée si les objectifs glycémiques ne sont pas atteints après 7 à 10
jours de règles hygiéno-diététiques.

 

Surveillance du
DG
 :

- Il
n’y a pas de surveillance particulière si DG est équilibré et en l’absence de
facteurs de risques surajoutés.

- Si
DG est déséquilibré ou en présence de FDR (obésité, hypertension artérielle
chronique) : surveiller la TA et rechercher une protéinurie.

- Si
DT2 découvert pendant la grossesse la surveillance fœtale  doit être renforcée à partir de 32 SA.

Accouchement :

39 SA + 0J :
représente l’âge gestationnel  à
atteindre si possible

En cas
d’acceptation de la voie basse, la surveillance du travail ne nécessite pas de
surveillance spécifique.

Si une patiente
est traitée par de fortes doses d’insuline, une concertation préalable avec le
diabétologue est recommandée pour décider de la prise en charge pendant le
travail.

Une césarienne est
particulièrement  indiquée lorsque  le poids fœtal estimé est supérieur à une
valeur seuil de 4250 ou 4500 g.

 

Prise en charge
du nouveau-né
 :

La naissance peut
avoir lieu dans la maternité de proximité si GAT sans complications.

Le risque
d’hypoglycémie sévère est faible en cas de DG

Surveillance  systématique de la glycémie est préconisée si
DG traité par insuline ou dont le poids de naissance est < 10e  ou > 90e 
percentile.

 

Post-partum et
contraception
 :

 Les femmes ayant eu un DG doivent être
surveillées dans le postpartum immédiat pour s’assurer de la normalisation des
glycémies sans traitement.

Le choix du
contraceptif est le même que chez la femme normale. Cependant le stérilet (DIU)
doit être privilégié devant une  obésité,
une hypertension artérielle, une dyslipidémie.

 

Pronostic :

Maternel : Le DG constitue un marqueur précoce du
risque de survenue d’un DT2.

Il est donc
nécessaire de surveiller régulièrement la tolérance au glucose de ces femmes et
de mettre en œuvre  des mesures
préventives :

- Normalisation  ou stabilisation du poids,

- Maintien  d’une activité physique régulière,

- Limitation  des autres facteurs de risque vasculaire.

Fœtal : Le risque d’obésité et de diabète est
augmenté chez ces enfants.